L’arrivée, ces jours-ci, de nombreux migrants haïtiens au Québec dont beaucoup de familles et d’enfants fait la une des journaux.
Voici quelques albums à découvrir pour aider les enfants à comprendre notre monde si complexe.
Haïti, une île sous le vent : une plongée dans son histoire et sa culture.
Haïti, une île sous le vent, l’album-coffret de l’artiste plasticien William Neslon est à la fois un livre d’histoire, un livre de contes, un livre d’images et un livre d’art.
L’île, première république noire et terre du premier génocide indien, appelé autrefois, comme on l’apprend ici, Ayiti ou Espagnola, acquit son indépendance en 1804. Patrie de Toussaint Louverture et terre de Vaudou, les choses sont ici racontées avec clarté.
Une dizaine de pages, organisées en courts paragraphes, raconte l’histoire de l’île. Puis une longue banderole de papier, reproduction recto verso d’une toile sur laquelle ont été fixées des milliers de paillettes et de perles de verre, raconte cette même histoire, en images. Des légendes expliquent fort bien les différents tableaux. Mots et images s’entrelacent harmonieusement pour donner à voir et à comprendre un peu plus de l’histoire et de la culture d’Haïti.
On a vraiment envie d’accrocher cette fresque au mur et pourquoi s’en priver ? Ce sera magnifique et inspirant sur les murs d’une chambre ou d’une classe.
« Cric ! dit le conteur. Crac ! dit l’assistance. Ainsi commencent les veillées en Haïti. »*
*extrait de Haïti, une île sous le vent, William Wilson, Gallimard Jeunesse Giboulées, 2015
Partir au delà des frontières : quand il faut tout quitter pour l’inconnu.
Partir au delà des frontières a été écrit et illustré par Francesca Sanna, une jeune designer italienne vivant en Suisse. Elle est allée à la rencontre de nombreuses familles de migrants.
Le narrateur, un jeune garçon, nous raconte comment il doit fuir, avec sa mère et son frère, son pays en guerre. Cette guerre qui lui a tout pris, y compris son père. Le texte simple, beau et profond est rédigé au présent. Le lecteur se trouve donc au plus près des événements, d’autant que ceux-ci ne sont pas datés et que le pays n’est pas nommé.
Pas de filtre donc placé entre le lecteur et ses émotions. Au rythme du texte, nous fuyons, nous aussi. En chemin, on découvre la peur, la tristesse et la mort qui habitent ce texte, magnifiquement illustré.
Le noir, très présent et très éloquent, cohabite avec des camaïeux de bleus et de verts, porteurs d’espoirs. Car, cet album difficile est aussi un album lumineux dans lequel il est question de confiance et d’amour. La confiance et l’amour, c’est ce que nous pouvons, avec la lecture et le partage de ce livre, offrir aux enfants.
Un livre beau et un livre vrai comme celui-ci peut être le point de départ d’une discussion nécessaire entre enfants et adultes, entre ceux d’ici et ceux que nous accueillons. Ce livre rend d’ailleurs hommage à toutes ces personnes, à leur parcours particulier, et à la force incroyable dont ils témoignent.
« J’espère que bientôt, comme ces oiseaux, nous trouverons un endroit pour nous. Une maison bien à l’abri, où nous pourrons reprendre notre vie. »*
* extrait de Partir au delà des frontières, Francesca Sanna, Gallimard jeunesse, 2016
Enfin, il me reste au moins un album à vous recommander pour que cette sélection soit cohérente : il s’agit de Bienvenus de Barroux.
Ce n’est pas tout de comprendre d’où viennent ceux qui fuient et pourquoi ils sont forcés de trouver une terre d’accueil. Avec le texte de Barroux, pas de place à l’indifférence ou au statu-quo, il faut s’engager !
Nous sommes bousculés, gentiment bien sûr. Cette histoire, qui met en scène des girafes qui prennent le thé et des ours qui jouent au tennis, est avant tout drôle et loufoque.
Dans cet album, les migrants, ne sont pas des exilés politiques mais des exilés climatiques. Autre sujet d’actualité sur lequel on ne peut fermer les yeux. Le ton est léger, les couleurs vives et le texte très simple puisqu’il s’adresse aux lecteurs dès l’âge de 3 ans.
Mais qu’on ne s’y trompe pas cependant, il y est bien question de valeurs humanistes. Que l’on soit girafe ou panda, on a tous droit à une terre pour vivre.
Il n’y a pas d’âge pour commencer à sensibiliser les enfants pourvu que ce soit fait intelligemment et brillamment. C’est le cas quand c’est l’œuvre de Barroux !
« Nous nous retrouvons juste tous les trois. Et nous dérivons au milieu du bleu de l’océan.
Il nous faut chercher un nouveau chez-nous. Mais tout autour l’eau s’étend à perte de vue. »*
*extrait de Bienvenus, Barroux, Kaléidoscope, 2017
Pour ne pas tomber dans le piège de l’indifférence et tenter de penser le monde sans murs et sans frontières, on peut donc commencer par lire et faire lire.
La terre aux humains et les livres aux enfants !
◊ À lire aussi :
Akim court, Claude K.Dubois, Pastel, 2012
Eux, c’est nous avec un texte inédit de Daniel Pennac, Collectif Cimade, Gallimard jeunesse, 2015