J’ai croisé des rébarbatifs, des boudeurs de textes, des récalcitrants à la vue de l’épaisseur d’un roman, des « ça m’intéresse pas », mais j’ai aussi vécu le grand sourire qui s’étire à la fin du bouquin lu d’une traite pour la première fois, le soupir de satisfaction et symbole de passage vers l’âge adulte. On rêve de grandir, non, lorsqu’on a 13 ou 14 ans ? Les ados sont touchants et les amener vers la lecture est un défi quand on pense à la multitudes de livres à proposer, mais surtout à la multitude de leurs différences, de leurs aspirations et de leurs vécus. Quel sera LE livre clef vers le plaisir de la lecture?
Un jour, j’avais laissé trainer un roman de Xavier-Laurent Petit sur la table de chevet de mon gars de 13 ans. Ce roman, L’Homme du jardin, suscite et suscitera toujours chez moi de vibrantes émotions car il est relié au sourire de mon fils et à cette petite phrase : Ah ça, j’aime bien! Immense bonheur de la victoire. Il n’est pas devenu un grand lecteur pour autant mais a acquis la certitude au fond de lui qu’il pouvait le devenir. Mais qu’est-ce qu’un grand lecteur? 
Celui qui dévore dix livres par mois ou celui qui lit quand il l’a décidé à travers un choix très précis, donc sélectif? Un roman se cache et attend chaque adolescent. Parmi les jeunes que vous connaissez, il y en aura peut-être un cet été qui aura le bonheur de cette rencontre, la rencontre entre sa voix et celle d’un auteur. Mais que proposer ?
Le merveilleux et la force de la nature dans ce récit de Jean-François Chabas, Les filles de Cuchulainn ?
Un roman qui allie science et société à travers l’évolution passionnante de Calpurnia en 1899 au Texas, jeune fille remplie des aspirations de son temps ?
Une dystopie magnifiquement menée sur 3 tomes aux titres évocateurs: Promise, Insoumise, Conquise ?
Une histoire plus intime qui raconte l’éveil du jeune Kévin au monde des livres dans un contexte familial loin d’être favorable. Un parallèle avec le personnage de l’Attrape coeur de Salinger explique pourquoi ce titre, Holden mon frère ?
Ou pourquoi pas, proposer De grandes espérances, adapté par Marie-Murail qui a fait un travail fabuleux de « dépoussiérage » comme elle le dit elle-même à propos de ce texte de Dickens ?
Une aventure polynésienne dans Le ventre du monde, récit poétique, histoire familiale et rencontres avec les dieux géants de la mer?
Trouver dans le journal intime de cette jeune fille qui s’appelle Mina un écho à leurs propres questions sur la vie?
Et tant d’autres titres prometteurs… Les jeunes n’attendent pas seulement des histoires fantastiques. Ils attendent surtout qu’on leur parle d’eux, subtilement, sans être ni trop près ni trop loin de leurs émotions.