«Nous vivons en surfant sur l’écume de la vie sans jamais comprendre vraiment ce que c’est que la vie.»
Extrait du prologue de Après la vague, Pôle Fiction, Gallimard Jeunesse, 2017
Les romans de Orianne Charpentier mettent en scène des adolescents fragiles et en pleine exploration des émotions qui les habitent. Happés par la poésie de son écriture, nous sommes déconnectés du monde et du bruit qui nous entourent. La lecture de ses romans nous conduit vers des territoires intérieurs insoupçonnés.
Les histoires que vivent ses personnages les confrontent, et nous confrontent aussi, à une réalité souvent très difficile. Que ce soit Max dans Après la vague, Guenièvre dans La vie au bout des doigts ou Rage, dans son dernier roman Rage, la vie ne les épargne pas.
Max doit faire face à la perte de sa jumelle lors du Tsunami, Guenièvre vit au milieu des bombardements et des milliers de morts de la première guerre mondiale et Rage doit fuir son pays en guerre.
« Ils avaient roulé sur la route poussiéreuse, plus lentement qu’ils ne l’auraient voulu, et Rage croisait parfois le regard de plus infortunés qu’eux, qui fuyaient à pied, portant sur leur dos des paquets ou des enfants épuisés. »
Rage, p.20, Scripto, Gallimard Jeunesse, 2017
Pourtant, les romans écrits par Orianne Charpentier sont résolument lumineux et nous en sortons grandis. Aucune violence n’est gratuite, rien dont toute la beauté du monde ne puisse venir à bout. Si Rage est meurtrie par son passé et semble coupée de son humanité, une nuit, sa rencontre avec Jean et l’apprivoisement d’un chien de combat la ramèneront dans le monde des vivants.
C’est à rebours que j’ai lu l’œuvre d’Orianne Charpentier. Avec Rage, son roman le plus récent, j’ai fait l’expérience d’une tragédie moderne, une histoire dense d’une centaine de pages. Puis avec Max, dans Après la vague, j’ai partagé son sentiment de culpabilité d’avoir laissé sa sœur jumelle mourir. Avec Guenièvre, j’ai découvert la capacité de résilience des hommes face à des situations dramatiques.
Chaque roman m’a rappelé à quel point l’humain est capable de grandes choses, qu’ensemble nous sommes plus forts et que la littérature, comme celle des romans d’Orianne est définitivement essentielle.
« New-York était bien plus proche à présent. Le bateau contournait la statue de la Liberté, cette immense femme fière qui brandissait une torche et un livre (…)
« Oui, pensa-t-elle. Pour être vraiment libre, il faut des livres. »
La vie au bout des doigts, Scripto, Gallimard Jeunesse, 2014
Je me demande comment son métier de journaliste nourrit son écriture. Est-ce sa capacité à mener des enquêtes dans la vie qui la pousse, dans ses romans, à mener l’enquête de la Vie ?
Je voudrais aussi qu’elle me parle du devoir de mémoire. Chacun de ses personnages y fait face et c’est ce qui lui permet d’avancer et de regarder sereinement vers l’avenir.
J’ai été bouleversée par chacun des romans d’Orianne Charpentier. Et je ne vous ai rien dit de Mauvaise graine, cette histoire magnifique dans laquelle un adolescent introverti et mal dans sa peau se transforme en un jeune homme digne et capable d’être heureux. La relation qu’il construit avec son père, gravement malade, le marquera à jamais.
« J’ai reposé le carnet. Je venais de découvrir que mon père, qui n’avait jamais pris l’avion, était en fait un grand voyageur. (…)
Je crois que c’est comme ça avec les êtres qu’on aime : dès qu’on sait qu’on les aime, ils sont en fuite. Une part d’eux nous échappe toujours, et parfois on passe sa vie à chercher à l’atteindre. »
Mauvais graine, Scripto, Gallimard Jeunesse, 2010.
Ouvrez n’importe lequel de ses romans, le charme agira ou plutôt la littérature agira, j’en suis certaine. Venez la rencontrer à Montréal ou à Québec. Elle nous dira pourquoi elle choisit d’écrire des romans pour les ados.