Cette année, Quentin Blake nous fait deux cadeaux magnifiques. Tout d’abord, la parution d’un ravissant album poétique, Les trois chouettes, en collaboration avec Emanuele Luzzatti et John Yeoman. Tout en rime, nous voyageons au rythme des mots et des images à travers les pays et les saisons. Le regard des petites chouettes nous font sourire. Dessins et couleurs apportent toute la dynamique au texte qui coule comme une rivière sur les petits cailloux.
Ensuite, il nous offre une entrée grandiose dans son monde, avec un livre largement illustré dans lequel il évoque son métier de créateur, Pages, mots, images. Plus de 50 années de travail nous est livré avec la simplicité des grands artistes.
Et en effet, cet ouvrage est vraiment précieux. Au-delà des livres que nous connaissons si bien (Matilda, Zagazou et tant d’autres) qui sont largement évoqués ici, Quentin Blake nous montre ses croquis, ses esquisses, des affiches ou des dessins pour beaucoup, publiés dans des revues aujourd’hui épuisées.
Ce n’est pas un livre rellement autobiographique, mais le métier est relié à sa vie.
On y comprend les influences du dessin humoristique ou de la caritcature, celle des films (Les enfants du paradis) ou de grands artistes tels que Honoré Daumier, ou l’illustrateur André François (et oui! le fameux qui a créé le mythique papillon de l’école des loisirs). Les illustrations c’est « comme un petit théâtre » dit-il. On capte une action dans la pose, le geste, l’attitude.
L’on comprend aussi l’importance du rythme et du choix capital des séquences pour la dynamique du livre. Les gags visuels se laissent savourer et contribuent à l’atmosphère.
Blake ne laisse rien au hasard. Pour chaque projet, il raconte le lien avec les auteurs, ou sa démarche, confiant au lecteur par-ci par-là les petits tracas ou les surprises qu’il a pu avoir. Par exemple pour Les poules de Yeoman, les illustrations suivent parfaitement le déroulement de l’action. Alors que pour Un amour de tortue, ce fut plus difficile car l’action se situe de façon superposée, d’un balcon à l’autre, donc dans la verticalité. Tout un défi!
Il livre beaucoup de sa technique et de cette relation délicate entre le trait et la couleur, leur rapport de force. Bien sûr, pour lui, c’est principalement le trait qui véhicule le message. Et si la jubilation est omniprésente, « l’enthousiasme ne suffit pas toujours à résoudre aussi facilement les problèmes spécifiques que pose le projet. »
Et comment parler de l’oeuvre de Quentin Blake sans parler d’humour? Voici ce qu’il en dit: « l’humour n’est pas un ingrédient à part que l’on ajoute à la mayonnaise ou dont on peut se débarrasser comme ça. Il a à voir avec votre façon d’être et de voir les choses. »
Comme l’indique lui-même l’auteur dans son introduction « vous pouvez tout à fait vous contenter de regarder ces images sans lire le texte; mais dans ce cas, vous constaterez assez rapidement qu’il ne s’agit pas ici pour, l’essentiel, d’un livre de souvenirs. » Prenez le temps de déguster, vous aurez envie de relire Le bon gros géantetu Le violon d’Yvon dans quelques minutes ou de vous envoler comme comme les trois chouettes pour mieux revenir.
Pages, mots, images, Quentin Blake, Gallimard.ISBN9782070659708