La frontière est mince dans la tête d’un petit enfant entre réalité et imaginaire. Avec le dernier album de Michaël Escoffier et Kris Di Giacomo, le ton est donné dès la première page: » Le jour où j’ai découvert que je pouvais voler, j’ai compris que je n’étais pas une enfant comme les autres. » Cet enfant, celui tant attendu, que l’on entoure d’amour à tout instant, ce tout-petit lancé dans les airs par les bras de son papa, est si confiant qu’il entre tout de suite dans la peau d’un super héros. Et pour réaliser ses exploits, il s’arrange avec la réalité, ruse pour confirmer ses pouvoirs, et surtout, fait beaucoup rire le lecteur. Devant les petits pois à finir dans l’assiette, par exemple, il lui faudra un peu forcer ses super pouvoirs.
D’expérience en expérience, cet enfant téméraire ira jusqu’à vouloir voler de ses propres ailes, mais atterrira rudement sur le sol. Pleurs, petite souffrance, maman est là qui, elle aussi, a des super pouvoirs de guérison. Ils sont bien de la même famille! La magie opère. Le jour où elle a perdu ses super pouvoirs, notre petit héroïne a réalisé qu’elle pouvait s’en remettre aux mains de celle qui l’aime le plus.
Peu de couleurs, un dessin efficace et expressif dans un trait vif, un langage corporel dans un lien légèrement décalé au texte (la page couverture est déjà hilarante), Escoffier et Di Giacomo forment décidément un duo de créateurs surprenant (Sans le A, Le loup tralala...). Le jour où j’ai perdu mes Super Pouvoirs est aux éditions Kaleidoscope. Album RÉJOUISSANT!
Pour faire des liens…
J’ai pensé à Superlapin (Stéphanie Blake), dans la construction de l’histoire et l’intervention maternelle. Superlapin est plus résistant cependant car il n’avoue jamais avoir perdu ses super pouvoirs.
…à Max et les Maximonstres de Maurice Sendak bien sûr, par l’attitude, les jeux, les actions menées par l’enfant, le dessin sur le mur et le chien qui court, mais aussi le gâteau déposé par maman à la dernière page
… aux livres d’Émile Jadoul dans le rapport de tendresse entre l’enfant et l’adulte (L’avaleur de bobos, But!) dans lesquels la maman est souvent celle qui répare … et aussi à Émile de Vincent Cuvellier et Ronan Badel,nouveau petit héros d’une série malicieuse dans laquelle Émile croit si fort en ses désirs que l’imaginaire transforme sa réalité, exactement comme dans cet album d’Escoffier et Di Giacomo. Un état d’esprit comparable.
Et tous ces petits héros croient en la magie de la vie. Ils ont raison, non?